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L'arrêt
sur les poursuites entreprises par le parquet de Nivelles contre
certains anciens travailleurs des Forges de Clabecq, rendu le 22
mai dernier par la cour d'appel de Bruxelles, a été présenté comme
une victoire triomphale par les leaders de l'ancienne délégation
syndicale, avec cette formule : "Acquittement sur toute la
ligne, sauf pour des virgules" !
Relayée sans grand esprit critique par une large part de
la presse, cette lecture de la décision judiciaire a ému
de nombreux concitoyens qui m'ont fait part de leur incompréhension
: l'impression d'impunité qu'elle dégage ajoute à leur
sentiment d'insécurité devant la montée de la
violence sous diverses formes.
Il est vrai que, malgré les interpellations de nombreux journalistes,
je me suis refusé à commenter à chaud cette
décision, dont le texte ne m'a d'ailleurs pas encore été communiqué :
ma déontologie de membre du gouvernement faisait obstacle à ce
que je réagisse officiellement sur un dossier dont j'avais
eu à connaître dans l'exercice d'une fonction judiciaire,
et qui est au demeurant clôturé pour l'essentiel, à savoir
le sauvetage des Forges.
La mission de la cour d'appel était délicate
:
1) La
personne qui m'a porté des coups au "Relais du
Marquis" à Ittre le 7 février 1997 est décédée
quelques semaines plus tard. Et les auteurs d'autres violences, dont
les conducteurs masqués des bulldozers qui avaient renversé des
autocars de la gendarmerie sur le bretelle de l'autoroute de Mons à Wauthier-Braine
le 29 mars, n'ont pas pu être identifiés. Aucune condamnation
ne pouvait donc être prononcée de ces chefs.
2) Dans
le feu d'une manifestation, des débordements peuvent
se produire. Sans pour autant les admettre, ils peuvent être
excusés par le fait de la détresse de ceux qu'une faillite
de cette importance prive brutalement de leur emploi. C'est ce qui
explique que le collège des curateurs n'ait pas porté plainte.
L'action syndicale ne devait pas être criminalisée.
A ce titre, le recours à une disposition légale remontant
au siècle dernier, qui, aux yeux du parquet, aurait permis
d'imputer les faits commis par d'autres à M. D'Orazio comme
meneur de grève, était pour le moins discutable.
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3)
Mais on ne pouvait pas ne pas sanctionner des infractions dépassant
le cadre de cette action syndicale, et notamment celles dont M.
D'Orazio s'était personnellement rendu coupable. C'est le
motif pour lequel celui-ci a été triplement sanctionné :
pour outrage à la police, du fait de la "descente" de
la délégation sur le commissariat de Tubize le jour
de l'aveu de la faillite ; pour menace à l'égard
de curateurs, d'un juge-commissaire et de leurs enfants lors de
la ratonnade du 7 février au Relais du Marquis ; pour la
rixe avec un automobiliste Avenue Louise. Tout cela n'avait évidemment
rien à voir avec la défense des intérêts
des travailleurs.
4) Quel que soit le dossier en cause, la loi doit être appliquée
de manière identique à tous les délinquants : s'il convenait
que M. D'Orazio soit sanctionné pour les infractions commises, il devait
aussi pouvoir bénéficier de la suspension du prononcé. La
cour la lui a accordée, comme à tout autre primo-délinquant
: la condamnation liée à la sanction des faits établis ne
sera pas prononcée s'il ne récidive pas dans un délai donné.
Ceci étant, l'arrêt rendu me paraît équilibré.
Il témoigne de la sérénité de la justice dans un
dossier dont la médiatisation pouvait donner à craindre de son
issue. Mais ne nous laissons pas aveugler par l'interprétation qu'en a
donnée M. D'Orazio : il a bien été sanctionné, et
la cour l'a d'ailleurs condamné à me verser l'euro symbolique que
j'avais demandé à titre de réparation.
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