Le 6 avril 2004
        La passion
 

La passion de Mel Gibson qui sort demain sur les écrans bruxellois ? Je ne veux pas entrer ici dans la polémique. De ce piètre exhibitionnisme – « On cogne, on gifle, on calotte, on flagelle, on fouette, on cloue, on transperce… Ça gicle, ça dégouline, ça coule à flot, ça cascade… C’est le rayon boucherie du supermarché, de l’évangélisation » écrit Le Soir de ce matin - je dirai seulement qu’il m’a ennuyé. Manifestement, c’est à tort que je me suis laissé entraîner à aller le voir en début de semaine sainte.

Alors, très vite deux livres merveilleux pour compenser cet échec : L’Evangile selon Pilate, d’Eric-Emmanuel Schmitt, l’homme de lettres français qui vit à Bruxelles, derrière la place Brugmann, et Le baiser de Judas de Hubert Prolongeau.

Le premier, couronné par le Grand prix des lectrices de Elle en 2001, je l’ai lu et relu et je l’achète par dizaines dans la collection du Livre de Poche (n° 15273) pour l’offrir à mes amis, comme j’en ai l’habitude avec les œuvres que j’aime. Le spectacle est proposé en deux tableaux. D’abord le Jardin des oliviers, où un homme attend que les soldats viennent l’arrêter pour le conduire au supplice, guidé par Judas, son meilleur ami, le seul en qui il ait assez confiance pour l’avoir chargé de le dénoncer afin que s’accomplisse son destin. Comment, simple fils de menuisier, est-il devenu un agitateur prêchant l’amour et le pardon ? « C’est toi qui le dis », avait-il coutume de répondre aux concitoyens qui le consultaient au seuil de l’atelier de son père, jusqu’à ce que le rabbin, jaloux, le renvoie le jour de ses 30 ans. Puis c’est Pilate qui entre scène, trois jours plus tard, au matin de Pâque, en rapportant dans ses épîtres à son frère la dispari-







tion du cadavre, sa réapparition, les progrès de l’enquête qu’il mène et le doute qui s’insinue dans son esprit. Et, avec le doute, la foi et l’amour.

Le second, récemment sorti de presse chez Grasset, trace le portrait de Judas, qui « est au christianisme ce que le nez de Cléopâtre est à l’histoire de Rome » comme l’écrivait Jean-Luc Pouthier dans Le journal du dimanche, en me donnant l’envie de le découvrir. Fils d’un potier de Galilée, Judas est entraîné, jeune, dans le sillage de Barrabas, qui veut chasser les romains de son pays, caché dans les grottes, harcelant l’armée… jusqu’à ce que survienne Jésus, dont la parole et le comportement fascine Judas qui voit en lui le chef naturel qu’il cherche pour entraîner un soulèvement général. Le malentendu est patent ; c’est lui qui poussera Judas au geste fatal qu’il pense salutaire.

Il me reste, en cette semaine de la passion, à terminer la lecture de Saint-Paul – Le témoignage mystique de François Brune aux Editions Oxus. De lui aussi, l’inventeur du christianisme, on peut dire que la face du monde ne serait pas la même s’il n’avait pas vécu.

Bonnes fêtes de Pâques.