Le 05 mai 2004
        Expropriations : une juste et préalable indemnisation
 

Aux termes de l’article 16 de la Constitution, toute expropriation est soumise au paiement d’une indemnité préalable, juste et équitable. Pour accélérer la construction des autoroutes, une loi du 26 juillet 1962 a cependant institué une procédure d’exception accélérée devant le juge de paix en cas de circonstances urgentes, alors que la procédure d’expropriation ordinaire s’exerce devant le tribunal de première instance. Le principe de cette procédure d’exception consiste à faire procéder la procédure ordinaire par une intervention simplifiée du juge de paix, dont la décision n’est susceptible d’aucun recours mais qui reste provisoire, eu égard à l’instruction sommaire, en ce sens que, sauf accord entre parties, le pouvoir expropriant et l’exproprié peuvent demander la révision du prix fixé par le juge de paix.

Cette situation pose cependant trois problèmes : la loi de 1962 devait elle-même être provisoire, dans la perspective d’une refonte de l’ensemble de la législation relative à l’expropriation, que l’on attend depuis plus de 40 ans ! les pouvoirs expropriants ont abusé du système, en recourant systématiquement à la procédure d’urgence ; et, même si cette hypothèse est exceptionnelle parce que dans 99% des cas les parties arrivent finalement à un accord sur le montant à payer, la révision peut aboutir à la condamnation de l’exproprié non seulement au remboursement de la partie du prix définitivement fixé qui dépasse le montant alloué par le juge de paix, mais aussi à des intérêts judiciaires qui, compte tenu de la longueur des procédures, peuvent être très lourds, voire absorber l’intégralité du prix payé !

 


 

 

La commission de la Justice du Sénat examine dès lors actuellement une proposition de loi déposée par M. Coveliers (VLD) dans le but de supprimer le droit pour le pouvoir expropriant de demander la révision, et elle en a débattu lors de sa séance d’hier mardi 4 mai. La question que je pose est de savoir si cette suppression ne provoquerait pas une hausse des prix dus par les pouvoirs expropriants qui grèverait indûment leurs budgets et réduirait la réalisation des expropriations nécessaires, par exemple pour construire dans l’urgence une ligne de chemin de fer ou construire une station d’épuration, parce que les expropriés ne seraient plus enclins à rechercher une solution amiable. Aussi ai-je proposé une solution alternative : le pouvoir expropriant maintiendrait son droit de recours, mais aucun intérêt judiciaire ne devrait être payé par l’exproprié, sauf si celui-ci a tardé à faire valoir ses droits ou en a abusés en retardant artificiellement l’issue du litige.

La discussion sera poursuivie la semaine prochaine.