Le 27 juin 2007
        L’avocat face à la directive blanchiment : la Cour de Justice valide l’obligation de dénoncer certaines pratiques
 

Chargé au sein du gouvernement de la lutte contre la grande fraude fiscale à l’époque de la présidence belge de l’Union Européenne de 2000, j’avais été associé de près aux négociations qui devaient déboucher ultérieurement sur l’adoption de la deuxième « directive blanchiment » et confronté à l’épineuse controverse sur l’obligation prévue dans l’avant-projet à charge des avocats de dénoncer les opérations douteuses de leurs clients. Compte tenu du désaccord existant à ce sujet entre la Commission Européenne, le Conseil et le Parlement, notre pays joua un rôle important dans cette négociation, puisque l’arbitrage du conflit fut déféré à la trilatérale présidée par Didier Reynders, auquel j’étais adjoint.

J’avais évidemment pris soin, dès ma nomination en 1999, de consulter le barreau belge, dont les éminents délégués m’avaient renvoyé sans autre commentaire à l’organisation représentative des barreaux européens, la CCBE. Au bout du compte, un accord avait pu être trouvé : lorsqu’il interviendrait dans des transactions financières ou immobilières, l’avocat soupçonnant son client de blanchiment serait tenu d’en avertir son bâtonnier ; en revanche il serait dispensé de cette obligation lorsqu’il conseillerait son client sur le plan juridique ou le défendrait dans une procédure judiciaire. La philosophie de l’accord était claire : le secret professionnel resterait garanti pour les activités juridiques traditionnelles de l’avocat ; il ne pourrait cependant être opposé par ceux qui, allant au-delà de ce qui était traditionnellement permis au barreau, interviendraient comme agents d’affaires dans des actes techniques.



 

Sans doute cette distinction, qui avait été négociée mot à mot, pour ne pas dire pied à pied, et donc admise par le barreau européen, fut-elle insuffisamment comprise. Toujours est-il que l’Ordre (belge) des barreaux francophones et germanophone la remit rapidement en cause, exigeant, à un congrès organisé à Liège et auquel je me souviens avoir reçu un accueil plus que glacial, le respect « absolu » du secret professionnel. Et, après l’adoption de la loi du 12 janvier 2004 sur la prévention du blanchiment transposant cette directive en droit interne, celle-ci fut contestée devant la Cour d’Arbitrage, qui interrogea à son tour la Cour de Justice Européenne.

La réponse de celle-ci vient de tomber : dans son arrêt d’hier 26 juin, la Cour a balayé toutes les objections formulées et consacré la directive (et partant la loi) contestée. Je me réjouis de cette clarification et j’espère que l’approche du barreau belge sera à l’avenir plus positive ; la réglementation du 12 mars 2007 relative à l’application par les avocats de la loi du 12 janvier 2004, qui vient d’être publiée, prouve que ceci est possible, notamment en ce qui concerne les exigences d’identification des clients.













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