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Les élections de fin d’année
judiciaire aux fonctions dirigeantes de l’Ordre des avocats
sont à chaque fois l’un des moments forts de la vie
professionnelle, tant le souci des confrères de présenter
à leurs amis les candidats de leur choix entraîne
une succession de colloques, de caucus et de réceptions
qui leur permettent de vivre la confraternité de manière
plus spontanée et chaleureuse que ce n’est généralement
le cas dans les confrontations à la barre.
A l’une de ces réceptions,
un stagiaire demandait aux plus anciens ce qui faisait une bonne
plaidoirie. « A cette question, réagissait
aussitôt Me Max Haberman feu Me José Vanderveeren,
le grand pénaliste, répondait que c’était
celle qui apportait au juge quelque chose de nouveau : il ne faut
surtout pas, conseillait-il, plaider ce qui a été
écrit en conclusions ». Me Frédéric
Clément de Cléty, un autre confrère pénaliste,
énonçait quelques conseils : « Parlez
anormalement lentement : votre débit est toujours trop
rapide. Variez de rythme. N’hésitez pas à
prendre plaisir à la plaidoirie. Attaquez le dossier par
un angle inattendu, créez la surprise. Soyez toujours humain,
compatissez… ».
Pour ma part j’ai rappelé
cette plaidoirie du Bâtonnier Van Pé, que j’avais
évoquée à l’occasion d’un hommage
rendu en 2001 à Jean-Louis Duplat, à l’initiative
de Maurice Lippens. Appelé par mes fonctions au gouvernement
à remettre à M. Duplat, qui sortait de charge comme
président de la Commission Bancaire et Financière
après avoir présidé le tribunal de commerce
de Bruxelles, la décoration que venait de lui attribuer
le Roi, j’évoquais le premier réquisitoire
du premier substitut qu’il avait été en début
de carrière et que j’avais entendu vingt-cinq ans
plus tôt, alors que j’étais moi-même
encore avocat stagiaire.
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Il
s’agissait d’une importante affaire de délinquance
en col blanc, dans laquelle j’étais commis pour la
partie civile. Face à Duplat, sur les bancs de la défense,
se trouvaient rassemblés tous les ténors du barreau,
rivalisant d’un talent oratoire exceptionnel encore qu’il
eut été parfois plus approprié aux Assises
qu’à la 22ème chambre correctionnelle.
Plaidant sur une prévention de faux
bilan et le comparant au visage d’une jeune fille que le président
du tribunal et lui-même avaient apparemment fréquentée
sur les bancs de l’université, le Bâtonnier Van
Pé osa ce propos :
« Rappelez-vous ce beau visage,
Monsieur le Président : rappelez-vous l’harmonie de
ses traits ! Avez-vous revu notre compagne depuis lors ? Le hasard
a croisé récemment nos chemins. Savez-vous qu’au
fil du temps, ce noble visage s’est flétri ? Un jour
une cicatrice est apparue sur la joue gauche. Qu’a fait cette
compagne d’études pour en effacer la trace et rétablir
l’équilibre du visage ? Elle a simulé une cicatrice
sur la joue droite ! Eh bien, Monsieur le Président, comment
ne pas comprendre que lorsqu’une cicatrice apparaît
au passif sur la joue droite du bilan, le chef d’entreprise
puisse être amené irrésistiblement à
en maquiller la joue gauche par une surévaluation de l’actif
? »
Qui plaiderait encore de la sorte aujourd’hui ?
Points
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