Le 03 octobre 2008
        Crise bancaire : manque d’intelligence de la situation de la part de Picqué ?
 

A l’occasion de la discussion de la déclaration de rentrée du gouvernement, présentée hier au Parlement bruxellois par le ministre-président Charles Picqué, j’ai tenté, mais en vain, d’obtenir quelques éclaircissements sur la situation actuelle.

Voici quelques extraits de mon intervention :

« La maison a cramé. Les pompiers fédéraux sont passés, heureusement ! Vous leur avez fait la courte échelle : très bien ! Mais sur les dégâts, on ne vous entend pas !

« Vous nous avez livré hier un discours incolore, inodore, insipide. Pas un mot sur les conséquences de la crise bancaire, ni même sur les conditions de l’intervention régionale. Votre discours compte 23 pages, soit à peu près 1.000 lignes. Sur ces mille lignes, il y a en a tout juste cinq qui évoquent la crise : à vos yeux, en d’autres termes, elle ne mérite pas plus de 0,5% d’attention de votre part, ou, en termes banquiers, « un demi point ». Et encore : vous vous êtes bornéà dire des platitudes sous la forme de généralités : nous devons être « attentifs », vous souhaitez « une solidarité et une indispensable unité » et vous en appelez à une « trêve institutionnelle ». Mais sur le concret : rien ; pas un chiffre !

« Mardi midi déjà, j’avais déposé une demande d’interpellation, que vous auriez pu saisir au bond. La Chambre s’est saisie du problème dès mardi après-midi, comme les parlements français, néerlandais et luxembourgeois. Cet après-midi le Sénat commence déjà des auditions sur les cause et circonstances de la faillite virtuelle de Fortis et de Dexia. Le parlement régional wallon en a débattu hier en séance plénière. A Bruxelles-Capitale : rien : pourquoi ?

« Nous avons besoin de dirigeants attentifs, proactifs, constructifs. Mais les dirigeants que nous n’avons en face de nous n’ont rien vu venir, et ils n’ont pas de vision d’avenir.

« Je ne veux m’appesantir à ce stade sur les responsabilités. Mais je puis vous demander si le gouvernement a suivi l’évolution de Dexia, que ce soit en direct ou au travers des mandataires de la majorité ? J’entendais ce matin Jean-Jacques Viseur, le bourgmestre de Charleroi, clamer que Dexia ne doit pas être « une machine à créer de la richesse », qu’elle doit être « un service aux communes » ! Lui, qui est administrateur de Dexia, pourquoi ne s’est-il pas opposé à ce qu’elle sorte du cadre de son métier de base en se lançant dans les « subprimes » aux Etats-Unis au travers de sa filiale FSA ; pourquoi ne s’est-il pas opposé à ce que l’aile bruxelloise du groupe Dexia supplée aux pertes dramatiques de FSA alors que, si ce que l’on raconte est exact, la Commission bancaire française avait refusé d’autoriser l’aile parisienne du groupe à le faire, tant le risque était intenable. Et j’entendais aussi hier Elio Di Rupo réclamer « des sanctions », en oubliant apparemment qu’on ne l’avait pas entendu lorsqu’il avait été lui aussi administrateur de Dexia, ni tous les autres administrateurs socialistes qu’il avait nommés !

 





« Alors, une nouvelle fois, pourquoi ce silence assourdissant ? Est-ce de votre part ou de celles de vos collègues ou collaborateurs un manque d’intelligence de la question ? Un manque de savoir-faire technique ? Je constate en tout cas qu’à chaque fois que se pose un problème économique d’une certaine technicité, votre gouvernement le met au placard. Je vise par exemple ma proposition de résolution du mois de mai sur la nécessité d’une intervention législative fédérale urgente pour corriger l’interprétation nouvelle de la Cour de cassation de l’article 46 de la loi sur les faillites concernant le sort des contrats conclus par un failli. Ne croyez pas que je m’écarte du sujet : il touche très précisément à la situation des cocontractants des banques. Sur la RTBF, au petit-déjeuner, hier matin, j’entendais les questions répétées d’emprunteurs : « Que se passera-t-il si mon banquier fait faillite ? Le curateur pourra-t-il casser le prêt hypothécaire et me demander de rembourser ; serai-je obligé de vendre ma maison pour payer ? ». D’une seule voix les spécialistes présents répondaient « non, certainement pas » ; alors que depuis l’interprétation litigieuse le curateur du banquier pourrait très bien prétendre agir de la sorte ! Eh bien, malgré la commotion que l’arrêt de la Cour de cassation a suscité dans le monde des représentants associatifs de l’industrie et du commerce à Bruxelles, malgré le support apporté par votre ministre de l’Economie qui a contresigné ma proposition, malgré l’appui d’un autre parti de votre majorité, la résolution est restée en rade : trop technique, sans doute, pour vous intéresser ».

J’ai ensuite évoqué les conséquences à court, moyen et long terme que pouvait avoir la défaillance de Dexia pour les communes de la Région, comme je le faisais avant-hier dans mon point d’actualité précédent. J’ai demandé, sans recevoir de réponse, quel était le coût de la participation régionale au plan de sauvetage, comment il serait financé si les communes devaient y participer : aucune réponse ne m’a été donnée. J’ai attiré l’attention sur les effets de cette défaillance pour ce qui concerne les dividendes que perçoivent les communes et le taux des crédits, ainsi que sur le risque de dilution de leurs participations. Pour ce qui concerne le long terme, j’ai évoqué la question du transfert du siège vers Paris, le risque de scission du groupe et celui d’une fusion de ce qui resterait de Fortis et de Dexia.

« De tout cela, il faudrait pouvoir débattre. De même que du choix de vos représentants ».

Dans sa réponse M. Picqué a déclaré qu’il était trop tôt pour mesurer les conséquences de la crise bancaire ; mais il s’est tout autant tu sur le passé, y compris pour ce qui concerne la nature, l’ampleur, les conditions, le coût et le financement de l’intervention régionale.

Comprenne qui pourra !











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