La directive européenne
de 1991 sur la prévention du blanchiment énumère
une série d’opérations de cette nature.
Pouvez-vous nous les rappeler ?
Parmi les opérations constitutives de blanchiment
figurent d’abord la conversion ou le transfert de
capitaux ou d’autres biens dans le but de dissimuler
ou de déguiser leur origine illicite ou d’aider
toute personne impliquée dans l’activité
illicite à échapper à toute poursuite.
Ensuite vient la dissimulation
ou le déguisement de la nature, de l’origine,
de l’emplacement, de la disposition, du mouvement
ou de la propriété des biens ou capitaux
dont on connaît l’origine illicite, ainsi
que leur acquisition, leur détention ou leur utilisation.
Enfin la notion de blanchiment
recouvre encore la participation à l’une
des opérations précitées, l’association
pour commettre ces actes, les tentatives de les perpétrer,
le fait d’aider, d’inciter ou de conseiller
quelqu’un en vue de les commettre ou le fait d’en
faciliter l’exécution.
Beaucoup de gens associent l’argent
sale à la drogue. Mais c’est en réalité
le produit de toute activité criminelle qui est
visé, et pas seulement le trafic de stupéfiants
?
C’est effectivement l’argent
de la drogue qui a été visé dans
un premier temps. D’où cette confusion. La
directive de 1991 permettait cependant déjà
aux États membres de viser toute infraction susceptible
de générer des produits substantiels et
passible d’une peine d’emprisonnement sévère.
Et son champ d’application a été élargi,
sous la présidence belge, par une nouvelle directive
du 4 décembre 2001 qui oblige notamment les États
membres à viser toutes les infractions graves,
et entre autres le terrorisme, la corruption, les atteintes
aux intérêts financiers de l’Union
européenne et toutes formes de criminalité
organisée, dont la grande fraude fiscale, ce qui
était déjà le cas en Belgique.
C'était déjà
le cas ? Nous étions en avance ?
Oui, et par ailleurs, sous la
directive de 1991, seuls les établissements de
crédit et les institutions financières étaient
obligés de dénoncer aux autorités
compétentes les opérations suspectes. Ici
aussi la Belgique avait une longueur d’avance :
notre législation anti?blanchiment était
déjà applicable aux casinos, aux réviseurs
d’entreprise, aux experts-comptables, aux conseillers
fiscaux, aux agents immobiliers, aux notaires. Dorénavant
ce sera aussi le cas dans l’ensemble de l’Union
européenne. Et on y a ajouté les avocats,
sous certaines réserves tendant à garantir
les droits de la défense, ainsi que les marchands
d’articles de grande valeur, tels que pierres et
métaux précieux ou œuvres d’art.
Cette nouvelle directive sera
très prochainement transposée en droit belge.
A cette occasion, vous avez proposé d’interdire
tout paiement en espèces à compter de 15.000
euros. Une décision qui a fait pas mal de bruit
!
Ma proposition, qui visait les
paiements dans les ventes de biens meubles corporels par
les commerçants, a été adoptée
par le gouvernement. L’interdiction en cause a été
inscrite à l’article 14 du projet de loi
de transposition de la directive qui est actuellement
à l’examen à la Chambre et devrait
être voté très rapidement.
Cette solution est un bel exemple
de la possibilité tout à la fois de faciliter
la vie des entreprises et de renforcer la lutte contre
la fraude grave. Si nous n’avions pas adopté
cette mesure, nous aurions été obligés,
en vertu de la directive, de soumettre tous les commerçants
à des formalités administratives complexes
et coûteuses. D’où l’accord unanime
qui s’est facilement dégagé sur ce
point avec les fédérations et organisations
professionnelles.
Un dernier mot au sujet du volet
répressif de la législation : en termes
de peine, que risquent concrètement le blanchisseur
et ses complices ?
Une peine d’emprisonnement
de cinq ans et une amende de 100.000 euros. Plus la confiscation
de tous les avantages obtenus à l’occasion
du blanchiment. Et, notez le bien, à cet égard
la nature de l’infraction dont le produit a été
blanchi importe peu.
Dans votre collimateur figurent
aussi les pavillons de complaisance et les centres offshore
? Ce sont des concepts difficiles à saisir par
l’homme de la rue, sauf lorsqu'un pétrolier
non conforme aux législations internationales englue
de mazout les plages des vacances...
C'est complexe. Disons pour être
simple que le pavillon de complaisance est celui des États
où peuvent être facilement constitués
des organismes, comme des sociétés ou fondations,
destinés à abriter artificiellement des
activités dont l’organisation serait plus
difficile ou onéreuse, voire illicite, si leur
opérateur devait se conformer à la législation
de son pays d’origine. Ces États réduisent
généralement à un minimum les charges
fiscales et parafiscales qui grèvent ces activités
: on parle alors de paradis fiscaux. Mais certains de
ces États sont aussi très laxistes sur le
plan des conditions d’exploitation, et permettent
ainsi aux opérateurs d’échapper aux
réglementations ordinaires en matière de
sécurité sociale, de protection du travail,
d’environnement ou de santé publique, etc.
Et le terme « offshore »
?
On parle de sociétés
offshore lorsque le régime offert aux organismes
constitués sous ces pavillons de complaisance est
réservé, par le pays où ils sont
établis, à des activités conduites
hors de leurs frontières, offshore signifiant au
large de leur territoire.
Les sociétés en
cause sont aussi appelées sociétés
boîte aux lettres lorsqu’elles n’ont,
à l’endroit où elles sont établies,
aucune réalité autre que la mention de leur
dénomination sur la façade de l’office
qui en abrite le siège, au demeurant fictif, et
que ce bureau se borne à recevoir et à transmettre
les ordres de l’opérateur auquel il offre
ses services.
Mais pareilles sociétés
boîte aux lettres peuvent aussi être établies
sous l’apparence de la régularité
dans des pays qui ne peuvent pas être qualifiés
de paradis fiscaux, pour servir de véhicule à
des activités plus ou moins licites dans le cadre
de montages artificiels qui font écran entre l’opérateur
et les tiers pour des raisons diverses. Il s’agit
essentiellement de cacher l’identité de l’opérateur,
tantôt pour des raisons de discrétion commerciale,
mais le plus souvent pour contourner des interdictions
de concurrence ou d’autres obstacles juridiques
ou fiscaux à ses activités, voire pour permettre
à l’opérateur d’agir illégalement
en tout anonymat et de se soustraire, le cas échéant,
à toute poursuite.
Vous l'avez expliqué, notre
arsenal juridique et fiscal était en avance sur
ce que préconisaient les autorités européennes.
Mais vous avez estimé devoir le renforcer ?
Depuis quelques années,
et particulièrement depuis qu’il a été
pris conscience de ce que les pavillons de complaisance
sont l’un des mécanismes principaux du blanchiment
d’argent et de fraudes environnementales, avec leurs
conséquences dramatiques en matière de pollutions
maritimes et de préservation du patrimoine de pêche
marin, la lutte contre ces pavillons et contre les paradis
fiscaux a été accentuée. Le GAFI
a préconisé à ce titre diverses recommandations.
J’ai veillé à les mettre en œuvre
par la loi du 3 mai 2002, qui vise à renforcer
le dispositif anti-blanchiment, notamment en imposant
aux intermédiaires financiers de dénoncer
toutes transactions avec des pays suspects.
Ce qui ne supprime pas, évidemment,
le problème de l'existence des paradis fiscaux
?
Certes. On y travaille. Plusieurs
organisations internationales ont pris conscience du danger.
En effet, avec la volatilité croissante des capitaux,
les pays à régime fiscal normal sont de
plus en plus exposés au risque de perdre une bonne
part de leurs recettes, sauf à taxer davantage
le travail ou la consommation. Depuis 1998, l’OCDE
a mis sur pied un forum destiné à lutter
efficacement contre ces paradis fiscaux. Une liste de
critères permettant d’identifier les systèmes
dommageables a été établie et un
inventaire dressé : en juin 2000, 35 juridictions
remplissaient ces critères. Depuis lors, 25 paradis
fiscaux se sont engagés à être plus
transparents et à améliorer l’échange
d’informations d’ici le 31 décembre
2005. Très récemment la Barbade, les îles
Maldives et les îles Tonga ont aussi été
radiées de la liste. Actuellement seuls 7 pays
restent pointés sur cette liste noire : la principauté
d’Andorre, le Liberia, le Liechtenstein, les îles
Marshall, Monaco, l’État de Nauru, et l’archipel
du Vanuatu. Dès avril prochain, ces États
s’exposeront à des sanctions internationales
s’ils ne s’amendaient pas.
Vous êtes, notamment, un
spécialiste du droit des faillites. Vous savez,
à ce titre, que la faillite est régulièrement
utilisée comme un outil déterminant de l’ensemble
des mécanismes de fraude grave et organisée.
Ceux qui opèrent derrière des hommes de
paille ou des sociétés-écrans se
débarrassent de celles-ci pour compliquer la reconstitution
des mécanismes de fraude utilisés et pour
réduire le risque de poursuites sur leur patrimoine.
Vous avez fait adopter à ce propos de nouvelles
dispositions légales. Pouvez-vous nous en dire
un mot ?
En bref, j’ai proposé
deux amendements à la loi sur les faillites. Le
premier dans le but de faire établir systématiquement,
dans chaque faillite, avec l’aide d’un expert,
un bilan de liquidation, de manière à déterminer
la consistance de l’actif et du passif et de clarifier
les principales causes et circonstances du dépôt
de bilan. Le deuxième pour permettre à toute
personne lésée par une faillite, et notamment
au Trésor, de poursuivre en comblement du passif
tout administrateur de droit ou de fait qui a, par une
faute grave et caractérisée, contribué
à la défaillance. Ces dispositions ont été
insérées dans une loi promulguée
le 4 septembre 2002.
Un mot aussi sur les fameux clignotants,
les indices de difficultés qui permettent de prévenir
les faillites ?
Oui, j’ai aussi entendu
veiller à mieux prévenir les faillites et
réprimer les fraudes qui les entachent en rapprochant
divers intervenants. La loi sur le concordat judiciaire
oblige le ministère des Finances à communiquer
aux services d’enquêtes commerciales des tribunaux
de commerce les indices de difficultés, autrement
dit les clignotants, que constituent les retards de paiement
de divers impôts. Les curateurs sont pour leur part
tenus par l’article 29 du code d’instruction
criminelle de dénoncer au parquet les infractions
qu’ils constatent dans l’exercice de leur
mission, et peuvent les communiquer au fisc lorsqu’il
est préjudicié. Mon propos est de voir comment
améliorer ces échanges. J’ai lancé
à cet effet une concertation entre les fonctionnaires
dirigeants de l’administration du recouvrement des
Finances, les présidents des tribunaux de commerce
et les curateurs.
Diverses fraudes impliquant des
banques ont été évoquées depuis
dix ans. Je songe à l’affaire de la Q.F.I.E.,
au dossier KB-Lux, à la question des sociétés
de liquidités…
Je me refuse toujours à
évoquer des dossiers en cours. Ne confondons pas
les rôles : c’est à la Justice qu’il
appartient de traiter les poursuites ; le mien est de
veiller à la bonne organisation de la lutte contre
la grande fraude pour ce qui concerne les Finances. Je
n’ai évidemment pas d’objection à
répondre aux questions que posent ces dossiers
sur le plan des principes, mais je me suis toujours soigneusement
gardé de divulguer des faits, de les confirmer
ou de les infirmer ou de me prononcer sur la culpabilité
des personnes mises en causes. Comme avocat, je mesure
tout le danger du préjugé et l’importance
de la présomption d’innocence. Et je suis
par ailleurs tenu au secret professionnel.
C’est donc seulement sur
le plan des principes que vous avez régulièrement
évoqué, en marge de ces dossiers, la question
de la coresponsabilité des professions de conseil
? Vous considérez que ces conseillers doivent être
poursuivis en même temps que leurs clients en cas
d’assistance à la fraude ?
Effectivement. Ne nous voilons
pas la face : il n’y a généralement
pas de fraude fiscale grave et organisée sans le
concours d’un conseil, seul à même
de concevoir et de mettre en pratique les montages savants
qui servent à échapper à l’impôt.
Et lorsqu’il apparaît que le conseiller a
dépassé la ligne rouge, il doit être
poursuivi en même temps que son client. Mais, pour
ne pas être trop long, je vous renvoie ici encore
à mon plan d’action où j’ai
développé mes réflexions à
ce sujet.
On vous a reproché de remettre
en cause de la sorte le principe du libre choix de la
voie la moins imposée !
Faux ! Il serait illusoire de
vouloir s’attaquer à ce principe, qui est
bien ancré dans notre droit, et à juste
titre. Encore faut-il que la légalité soit
respectée. C’est ce qui explique ma mise
en garde. Même s’ils peuvent se justifier
sur papier, d’un point de vue purement intellectuel,
certains mécanismes et structures sont impraticables
dans la réalité quotidienne de la vie économique
et financière, à tout le moins par une clientèle
« de masse », tant sont nombreuses et complexes
à respecter les conditions et formalités
auxquelles est subordonnée leur légalité.
Et il ne me paraît pas admissible que ces conseillers
« vendent » des « savonnettes fiscales
» sans en tenir compte. Pas plus qu’il ne
peut être admis qu’ils ferment les yeux sur
certaines pratiques, plutôt que de se déporter,
au point de faciliter la fraude fiscale. Il incombe donc
à tout conseiller de faire en permanence son examen
de conscience.
Le 7 février 2001, vous
avez organisé un colloque où vous aviez
invité Bernard Bertossa, Procureur général
de Genève et auteur de l’Appel de Genève
pour un renforcement de la lutte contre la criminalité
financière. Il a déclaré que la police
et la justice jouent toujours en troisième division,
tandis que les criminels sont en première ligue.
N’est-on pas très à la traîne
en matière de coopération internationale
?
Avant-guerre on reprochait déjà
à la police parisienne de poursuivre à bicyclette
les émules d’Al Capone qui fuyaient, eux,
en Citroën 11 Légère ! Sur le plan
international, l’image de M. Bertossa est tout à
fait justifiée.
Une fois encore, il faudrait mettre
de l'huile dans certains rouages ?
Parfaitement, et je vous en donne
un exemple. Il existe depuis 1959 une Convention européenne
d’assistance judiciaire en matière pénale.
Pour en élargir l’application aux infractions
fiscales, un protocole additionnel a été
conclu à Strasbourg le 17 mars 1978 et signé
par la Belgique le 11 août de la même année.
En prenant mes fonctions, j’ai constaté que
ce protocole additionnel n’avait toujours pas été
ratifié, alors que plus de vingt ans s’étaient
écoulés entre?temps ! De la sorte les fraudeurs
pouvaient toujours faire obstacle à une série
d’enquêtes à l’étranger
! J’ai évidemment veillé à
réparer cet oubli en faisant voter par le Parlement
une loi de ratification qui a été promulguée
le 28 février 2002.
Les attentats du 11 septembre
2001 contre le Word Trade Center à New York ont
jeté un éclairage particulièrement
dramatique sur les dangers du terrorisme. A l’époque,
vous avez convenu que la croisade entreprise par le président
Bush permettrait de progresser dans la lutte contre la
grande fraude fiscale ?
La nécessité d’une
plus grande transparence dans les opérations financières
internationales est apparue d’autant plus évidente.
Sous la présidence belge, diverses mesures ont
été adoptées ou lancées à
cet effet par l’Union européenne.
Je songe aussi au USA Patriot
Act du 24 avril 2002, un acronyme de Uniting and Strenghtening
America by Providing Appropriate Tools Required to Intercept
and Obstruct Terrorism. Cet acte complète et renforce
la loi américaine de lutte contre le blanchiment,
notamment en dressant une « liste noire »
de personnes soupçonnées de terrorisme.
Il ne vise en principe que des entreprises américaines
: banques, compagnies d'assurances, sociétés
d'investissement, agences de voyages, établissements
de jeu, bijouteries, etc. Mais en pratique il concerne
le monde entier, car il interdit aux institutions américaines
de travailler avec des banques d'outre-mer qui ne veulent
ou ne peuvent pas donner les informations requises et
permet de poursuivre toute institution étrangère
qui réalise des opérations sur son territoire.
Les banques belges concernées devront ainsi plus
particulièrement veiller à deux aspects
: l'identification de leurs correspondants américains
et celle des transactions suspectes. En clair, en cas
de transaction suspecte, le Patriot Act permettra la saisie
de comptes situés en dehors des États-Unis
si ce compte est tenu par une banque américaine
ou par une société liée.
Plus récemment, avec les
affaires Enron ou Worldcom et plus tôt chez nous
avec Lernout & Hauspie, l’attention s’est
focalisée sur la fraude comptable dans les entreprises
et sur les pratiques d’embellissement du bilan.
Celle-ci ne relève pas de vos fonctions au gouvernement,
mais vous y avez jeté votre regard de spécialiste
des entreprises en difficulté. Dans le contexte
de la discussion sur la corporate governance, vous vous
êtes notamment prononcé contre l’exercice
cumulé par les réviseurs d’entreprise
de la fonction de commissaire et de missions de consultance
?
Toutes les pratiques d’embellissement
du bilan ne sont pas illicites. Il en est de nombreuses,
comme par exemple la titrisation, dont la régularité
ne prête pas à discussion. L’image
qu’elles donnent de la situation de l’entreprise
peut néanmoins en être biaisée. Il
y a là, me semble-t-il, un premier sujet d’interrogation
qui devrait retenir l’attention des spécialistes.
Quant aux faux comptables qui
ont été constatés dans divers dossiers,
quelle en est la cause ? La tentation de flatter les comptes
pour masquer des difficultés est toujours forte.
Mais, dans un certain nombre de ces dossiers, elle paraît
avoir été accrue par le souci de certains
dirigeants d’optimaliser la valeur de leurs options
sur des actions du capital de leurs sociétés.
Ces dispositions avaient pourtant
été mises en place au départ pour
doper l'enthousiasme des cadres. Les réviseurs
n'ont rien vu ?
Si certains réviseurs ont
fermé les yeux, c’est peut-être parce
que les honoraires qu’ils percevaient pour fournir
diverses consultations dépassaient de loin ceux
que leur rapportait l’exercice de leur mission légale
de contrôle des comptes : le souci de se conserver
un client juteux les a ainsi amenés à fermer
les yeux sur certaines pratiques. Mais ne préjugeons
pas : dans un article récent de la Harvard Business
Review, commenté dans L’Écho par M.
Colmant, un professeur américain attribuait plus
généralement le phénomène
à un préjugé culturel. Beaucoup d’yeux
doivent encore être dessillés !
Une dernière question :
la lutte contre la grande fraude paraît pousser
certains fraudeurs au repentir. Pensez-vous qu’une
mesure d’amnistie fiscale serait appropriée,
à l’image de celle qui vient d’être
prise en Italie ?
Certainement pas une amnistie
au sens propre, puisque l’amnistie est un acte prescrivant
l’oubli officiel des infractions visées et
annulant leurs conséquences pénales. Un
blanc-seing rétroactif de cet ordre à des
contribuables ayant refusé, dans le passé,
d’assumer leurs obligations fiscales heurterait
l’éthique. Il ferait aussi l’impasse
sur l’origine des sommes pour lesquelles l’impôt
a été éludé, et pourrait permettre
de blanchir le produit d’activités criminelles.
Mais il est vrai que de nombreux
Belges désirent régulariser leur situation
et je pense qu’ils pourraient y être incités
en toute clarté, particulièrement lorsqu’ils
ont hérité d’une situation dont la
cause ne peut leur être imputée.
La réglementation permet
déjà une régularisation de cet ordre.
Selon l’article 444/8 du commentaire du code des
impôts sur les revenus, l’administration admet
que le contribuable qui déclare spontanément
les revenus dissimulés soit imposé de ce
chef sans application d’accroissement d’impôt
à titre de pénalité. Un contribuable
habile peut dans ce cas limiter l’impôt à
payer au précompte dû sur les revenus mobiliers
qu’il a obtenus au cours des trois dernières
années, ce qui représente un montant de
l’ordre de 2,25 % du capital.
Je pense qu’il se justifierait
de donner un cadre légal à ces régularisations.
Cela permettrait d’en définir plus précisément
les conditions, plutôt que de les laisser à
la discrétion des fonctionnaires, de subordonner
les régularisations à une contribution plus
adéquate et de les encourager, tant pour stimuler
l’économie par l’injection de capitaux
occultes importants, par exemple pour renforcer notre
industrie ou nos PME, que pour sanctionner plus facilement
ceux qui persisteraient dans la fraude.
Lire
la préface
(Chapitre 1) Lire "Alain
Zenner, de A à Z"
(Chapitre 2) Lire "Réformer
notre culture fiscale"
(Chapitre 3) Lire "Vous
pouvez me simplifier tout cela ?"
(Chapitre 4) Lire "Sus
à la pègre fiscale"
(Chapitre 5) Lire "Zenner,
commissaire à la simplification…
politique ?"
Lire la conclusion